La consultation
#LeJourdAprès consultation
L'automation EST le travail humain
Raisonner sur le jour d’après c’est toujours raisonné à partir du jour d’avant. Dès lors, toute initiative de changement qui se voudrait réelle est par avance condamner car elle se subordonne d’office à un système qui ne la rendra possible que si elle lui est compatible. Pour changer le monde il faut d’abord changer le système qui nous fait penser le monde. Ce n’est pas en pensant que l’on change les systèmes, c’est en changeant les systèmes que l’on change notre manière de penser.
Le sociologue Antonio Casilli dans son ouvrage En attendant les robots enquête sur le travail du clic, analyse ce qui constitue pour lui l’imposture théorique de la robotisation. Une mystification des algorithmes, et de la supposée « smartification » de la société, qui loin de produire plus d’intelligence, produirait plus d’automation, dont une grande partie ne vaudrait que part la participation active des hommes. Une société, qui après avoir annoncé la fin de nombreux métiers, fantasmé simultanément l’intelligence artificielle disruptive et immanente, doit se confronter à la réalité. Celle d’un « digital labor », qui une fois les hallucinations du conformisme de l’époque estompées, fait apparaitre un « travail tâcheronnisé et datafié qui sert à entraîner les systèmes automatiques ».
Un métier « digital » non pas au sens de numérique, mais bien au sens latin de « digitus », doigt , celui qui au bout de votre main clique sans relâche pour nourrir le « big data ». Un projet politique, selon l’auteur, qui ne décrirait pas sa réalité, entretiendrait toute sorte de chimères, afin de faire accepter toujours plus de précarité et donc de soumission, via « l’ubérisation » des métiers, la crainte du remplacement, mais aussi grâce à la déportation d’un travail gratuit, celui que chacun produit en interagissant avec les robots de toutes sortes et qui sont autant de productivité gagnée pour les entreprises à la poursuite de la croissance éternelle.
Pour le chercheur une réalité systémique d’un modèle qui vend du « tech » mais loue à bas prix des hommes. Alors, le progrès serait-il trop « robot » pour être vrai, pour reprendre le mot de Jacques Prévert ? Difficile à certifier, alors même que l’on constate que pour l’instant, c’est moins le robot qui prend la place de l’homme, que l’homme qui se conformant aux limitations de la machine en devient lui-même l’instrument. « Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde » nous avait déjà averti Albert Camus.
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